Cluny Lecture : rencontre virtuelle du 3 novembre 2020

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Pour cause de confinement, nous avons échangé nos comptes rendus par courriel. Avec À crier dans les ruines d’Alexandra Koszelyk (compte rendu de Helmut Meise, cf. infra) et Boy Dioula de Yancouba Diémé (compte rendu de Ulla Eckford-Jones, cf. infra) nous terminons notre saison de lecture. Il ne nous reste plus qu’à choisir notre lauréat.e pour la saison 2020. La rencontre du 17 novembre consacrée aux discussions finales et au vote est annulée pour les mêmes raisons que celle du 3 novembre. Nous voterons par correspondance et vous tiendrons au courant des résultats.

BOY DIOLA, Yancouba Diémé, 2019, Flammarion

Auteur à la fois d’un roman et d’une biographie, Yancouba Diémé raconte la vie de son père Apéraw mais aussi sa propre enfance. « Boy Diola » ainsi appelait-on les jeunes hommes venus de Casamance pour chercher du travail à Dakar. En Casamance, au sud du Sénégal, il n’y avait rien, pas d’écoles et pas d’avenir pour les jeunes. Seules y poussaient les arachides. Un soir, sans dire un mot à son père, Aperaw quitte son village arriéré et part pour Dakar où il devient apprenti chez un garagiste. À la recherche d’une vie meilleure, il s’embarque pour la France. Employé aux usines Citroën, il achète un pavillon à Aulnay-sous-Bois et s’y installe avec sa famille.

Il y a plusieurs épisodes très émouvants. Pour Apéraw et sa famille, le comble du luxe serait d’avoir une piscine, alors ils commencent à creuser un trou dans le jardin. Sans connaissances et sans permis de construire, ils détruisent des canalisations et provoquent une catastrophe. Sa femme bien aimée est femme de ménage à l’aéroport. Le jour où quelqu’un la frappe au travail, Apéraw, homme de principes, est furieux. Pendant plusieurs jours il cherche le coupable mais bien sûr, il ne le trouve pas.
Le livre raconte les difficultés et les obstacles d’un immigrant venu d’une ancienne colonie en France. Apéraw ne parle pas la langue, il ne sait ni lire ni écrire. Mais c’est un homme assez intelligent et il possède surtout la qualité la plus importante pour mener sa vie : il sait se débrouiller dans toute situation.
Après quarante ans, Apéraw est finalement naturalisé français. Son seul commentaire est : « maintenant je n’ai plus besoin d’aller à la préfecture pour la carte de séjour. »

« Boy Diola » est la biographie particulière d’un immigré; la première partie est intéressante, la fin de livre est moins structurée.

À CRIER DANS LES RUINES, Alexandra Koszelyk, Aux Forges de Vulcain

Une histoire d’amour sur fond de la catastrophe nucléaire de Tchernobyl. Léna, fille d’un couple de scientifiques, et Ivan, fils de paysans forestiers, fréquentent l’école à Pripiat, ville dortoir à proximité de Tchernobyl. Âgés de 13 ans, ils vivent une histoire d’amour précoce et néanmoins profonde. L’incendie et l’explosion du bloc IV de la centrale nucléaire le 26 avril 1986 déchirent brutalement leur liaison. Le père de Léna, qui jouit du privilège de rapports scientifiques et personnels en France et qui sait immédiatement évaluer les conséquences de la catastrophe, réussit à quitter la région de Tchernobyl et l’Union Soviétique avec sa femme, sa belle-mère Zenka et Léna. Ils trouvent refuge en France, près de Cherbourg, où il travaillera dans une institution scientifique. Ivan quant à lui ne peut que rester dans la région de Pripiat avec sa famille pour y être relogé d’office à plusieurs reprises.

Vingt ans plus tard, afin de se rapprocher de son monde antérieur et de retrouver Ivan, Léna part en visite en Ukraine. À Kiev, elle trouve une agence de voyage proposant des excursions touristiques d’un jour à Pripiat. Les amoureux se retrouvent, une perspective se dégage, les conditions essentielles d’une nouvelle vie semblent réunies.

Cette trame permet à l’auteure de traiter des thèmes essentiels. D’abord les dangers de l’énergie nucléaire pour l’homme et la nature. Ensuite l’exil. L’auteure illustre la question de l’intégration dans le nouvel environnement ou de la conservation de l’identité nationale en opposant la grand-mère, Zenka, qui continue à parler ukrainien en France, et les parents de Léna qui s’intègrent totalement. En liaison avec l’exil, c’est la fidélité à son amour de jeunesse qui hante Léna et forme avec l’amour de la patrie lointaine un couple inséparable. Le quatrième grand thème du roman enfin est la compréhension et la satisfaction profondes que Léna éprouve au contact de la nature, que ce soit en Normandie, dans les pays qu’elle visite ou enfin à Pripiat. C’est là qu’en observant les plantes et les animaux décimés par l’irradiation mais luttant avec énergie et succès pour leur survie que Léna trouve la force d’entreprendre une nouvelle vie.

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